La douleur de l’injustice, la peine de la victime
Parce qu’il m’a agressée, il a perdu le droit d’enseigner, c’était sa peine. Même si j’allais en cour, il s’en sortirait blanchi ou, au mieux, avec une peine minimale. Le deuxième est resté impuni, aucune conséquence, aucun remords, que du plaisir… J’étais majeure et consentante, mais manipulée, et en cour il n’aurait aucune peine car ce n’est pas considéré comme un délit, on ne prend pas en compte la manipulation et l’abus de pouvoir car à 19 ans, on me disait adulte, et qui dit adulte dit quelqu’un qui est responsable de ses actes… Étais-je réellement plus responsable de mes actes à mes 19 ans qu’à mes 17? Connaissais-je vraiment la portée de son geste? Non… Lui ne se fera jamais imposer de peine… Et finalement le dernier, on ne prend même pas en considération le fait qu’il soit violent pour déterminer la garde de notre fille, pensez-vous réellement qu’on pourrait l’accuser d’agression sexuelle envers sa conjointe suite à une manipulation? Sa peine? Il n’en a aucune, même qu’il a gagné la garde partagée de son enfant.
Et moi qui suis la victime, qu’est-ce que je gagne dans tout ça? Je gagne une peine, je gagne la peine qui aurait dû leur être imposée. J’ai gagné une peine qui dure depuis environ 20 ans, pendant toutes ces années j’ai vécu prisonnière d’un trou noir, tel le trou des prisons. Pendant 20 ans j’ai tout fait pour m’en sortir, mais ce genre de peine, il ne suffit pas de faire son temps pour qu’elle se termine. Cette peine, elle vous suit, vous broie le cœur en mille morceaux, le tord dans tous les sens, elle fait tellement mal que tout votre être espère profondément disparaître un jour, et vous espérez tellement, que c’est ce qui finit par arriver, vous devenez un fantôme, le fantôme de votre vie. Ce qu’il y a de bien avec les fantômes c’est qu’ils ne sentent pas les émotions, comme si la peine avait disparu, c’est une libération conditionnelle… Conditionnelle parce que cette libération a un prix. Ce prix : la perte de l’identité, de la personnalité, la perte de la joie, la perte de soi, la perte de la vie, ce n’est qu’une survie… À quand la fin de ma peine, la vraie libération, le retour à la vie, la vraie? Ma peine je l’ai vécue, je l’ai pleurée, je l’ai mise de côté comme si elle avait cessé d’exister, mais elle est toujours là, je dois la vivre pour qu’un jour je sois enfin libérée. Et eux, à quand leur peine? Jamais… j’ai été prisonnière à leur place, c’est ça la douleur de l’injustice.
Étoiles de mère, le papillon bleu.